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NICE Grande distribution, main basse sur la villeCOMMERCE GRANDE DISTRIBUTION - Le hard discount décolle, avec la bénédiction du Gouvernement et les lois dans la poche. Coup de grâce pour les commerces de proximité ?

Révélation, émotion, déclarations. Ancienne boîte de nuit désaffectée au centre de Nice, après avoir été naguère un cinéma couru, le Grand Escurial est, en ce début d’année, redevenu une vedette sans avoir rien demandé. « L’affaire » a même failli ne pas en devenir une si, telles les oies du Capitole, les riverains n’avaient appris que le propriétaire des murs était en train de les céder à une enseigne de « hard discount ». Et n’avaient alerté les associations, puis l’opinion. Avant que les politiques ne s’en saisissent. Et le maire de déclarer que « l’installation d’un supermarché irait à l‘encontre totale de la revalorisation de ce quartier si longtemps laissé à l’abandon. » Est-ce à dire que la revalorisation des autres secteurs commerçants n’intéresse pas la municipalité ? 

Car l’arbre du Grand Escurial ne doit pas cacher la forêt de l’offensive que mène la grande distribution alimentaire à prix cassés (Leader Price, Lidl, Aldi , ED) : après avoir quadrillé et – la plupart du temps – tiré vers le bas les périphéries, la voilà prête à investir les centres. « Il y a beaucoup d’agitation », constate un fin connaisseur de ce marché. « Ils sont dans les rues ; ils cherchent… » Certains ont déjà trouvé, comme le petit Franprix du côté de Grosso. Toujours à Nice, des rumeurs circulent  sur un Leader Price à la sortie de l’autoroute, en surplomb de la place du Ray, comme troisième larron aux côtés des Casino et autre Champion. En haut du boulevard Gambetta, l’emplacement de Literie Conseil est ouvertement visé.

Un Champion tout neuf dans l’ancienne concession automobile  de l’avenue Désambrois, des incertitudes autour de Conforama, avec des candidats à la reprise de 1.000m² dans les quartiers Est de Nice. Un temps lorgné par Intermarché, le magasin d’ameublement de la rue Dante reste à l’écart… pour le moment. 

Psychose ou réalité ? Et Nice n’est pas la seule visée : ED aurait un programme de 30 implantations par an dans le département, tous bassins confondus. Seul secteur encore épargné : l’Est du 06, au grand désarroi des municipalités, souvent démunies en surfaces adaptées.

A la base de ce subit déferlement, la loi de modernisation économique (LME) qui faisait suite (avec quelques restrictions toutefois) au rapport Attali, préconisant dans le domaine commercial le principe de déréglementation, déjà à l’oeuvre dans la finance. En levant la barrière d’accès entre la périphérie et la zone intra-muros, le Gouvernement visait une baisse des prix de l’offre de produits… et la hausse de la consommation. Mais il n’a pas pris suffisamment en considération le sort du commerce indépendant, d’après Bernard Chaix, qui parle de « catastrophe».
Un hard discount en centre-ville, entre Clémenceau et Jean Médecin ? « Ce projet d’exploitation commerciale est à l’étude depuis longtemps », souligne le vice-président de l’UPE 06. « Aujourd’hui, la SNCF a toute latitude pour le réaliser si elle le veut. Les petits métiers de bouche, qui animent nos rues, vont être percutés de plein fouet. En pleine contradiction avec la volonté, affichée par ailleurs, de rendre les cités attractives. » Il est pitié aujourd’hui de regarder le marché de la place Fontaine du Temple : « nous étions 16 fruits et légumes quand je suis arrivé en 97. Nous ne sommes plus que quatre », soupire l’un deux, en regardant le Casino.

Car non seulement la grande distribution a la puissance de feu nécessaire, mais elle a aussi les pouvoirs publics dans sa poche. Quel boutiquier peut résister à une ouverture 7 jours sur 7 quand il est le seul à respecter la loi ? Et la mécanique est vicieuse : tricheur (comme d’autres), le Champion du Mont-Boron a de fait obligé l’Intermarché du port à le devenir, mettant ainsi à sec la rue Bonaparte, naguère l’une des rues les plus animées de Nice. Pendant que la ville regarde passer les trains et que la préfecture conseille aux commerçants de faire eux-mêmes…. la police, en faisant constater les délits des casseurs par huissier, à leurs frais, pour ensuite porter plainte ! Les semi-remorques, en principe interdits de circulation, continuent leurs rondes matinales, ayant même obtenu des édiles l’interdiction de stationnement des particuliers dans les rues trop étroites. On le voit, c’est la lutte du pot de terre contre le pot de fer, dans la licence la plus totale.

N’ignorant pas qu’il faisait rentrer le loup dans une bergerie déjà sous perfusion, le législateur a bien prévu, en toute extrémité, un droit de préemption des communes sur des commerces ou sites sensibles préalablement déterminés par un périmètre. Mais sa mise en œuvre, bien compliquée et fort coûteuse, laissera passer le gros des envahisseurs : « Nous demandons à tous les commerçants de rejoindre la Fédération du commerce niçois et azuréen » exhorte Philippe Desjardins, son président, « pour que nous soyons alertés, comme à l’Escurial. Et fassions pression sur les élus».
Un combat devenu bien dérisoire.

Jacques BRUYAS

LA TRIBUNE 


 

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