Coluche aurait été assassiné sur une route de la Côte d’Azur entre Grasse et Nice. Lady Diana exécutée par les services secrets anglais…Les attentats du 11 septembre ne seraient pas imputables à Ben Laden mais à l’administration Bush !!! Les théoriciens des « complots » s’en donnent à cœur joie sur Internet, gigantesque vecteur de propagation. Les « conspirationnistes » connaissent un succès croissant. Parmi eux, il convient de décerner un Oscar à Thierry Meyssan ! Il s’était déjà illustré en signant en 2002 « l’effroyable imposture », livre dans lequel il affirmait, malgré preuves et témoignages multiples, que les attentats du 11 septembre n'étaient pas l'œuvre d'Oussama Ben Laden mais d'un complot intérieur !

Meyssan récidive. Le 19 juillet, sur le site du réseau Voltaire, il développait une nouvelle « théorie » selon laquelle Nicolas Sarkozy serait un agent de la CIA !! L’article, intitulé « comment la CIA a placé un de ses agents à la présidence de la République française » qui circule sur Internet, a été lu prés de 13 000 fois ! Preuve que les fausses informations séduisent une partie de l’opinion.

Le déferlement, fort préoccupant, de ces inepties s’apparente à l’ancestral phénomène des « rumeurs ». Un livre, paru en 1969, « La rumeur d’Orléans », étude dirigée par Edgar Morin, s’était avéré prémonitoire. Il décryptait les raisons pour lesquelles persistait une rumeur alors qu'il était très nettement établi que celle-ci était sans fondement. Cette affaire laissait entendre que des cabines d'essayage de plusieurs magasins, tenus par des commerçants juifs, servaient en fait de piège pour faire disparaître des jeunes filles.

L'histoire ne reposait sur aucune donnée, mais rien n'a pu mettre fin à la rumeur, reprise dans les médias. Un phénomène comparable s’est produit au début des années 80 prés de Nice, après l’ouverture d’un hypermarché. Des bruits persistants faisant état de très nombreuses agressions de clients, avaient envahi la Côte d’Azur. Une enquête avait démontré le caractère mensonger de ces agressions. Pourtant, de nombreuses personnes demeurèrent convaincues que les autorités leur avaient « caché la vérité ».

Ce type d'histoire se répète de manière périodique, comme le souligne au Nouvel Observateur, Jacques Mistral spécialiste des Etats-Unis à l'Institut français des relations internationales (IFRI) : « un mécanisme de même nature est à l'œuvre pour le 11 Septembre. Dans ce cas, il se combine avec une espèce d'antiaméricanisme : quoiqu'on évoque à propos des Etats-Unis, des fantasmes s'y greffent, et la théorie du complot ressort ». Dernière « version », fracassante, celle de Jean-Marie Bigard. L'humoriste a déclaré, le 5 septembre sur Europe 1, être «absolument sûr et certain» qu'aucun avion ne s'était écrasé contre le Pentagone. »

Quelques jours plus tard, il est revenu sur ses propos. Mais la théorie du complot, façon Bigard aura permis aux nombreux sites Web qui remettent en cause la version officielle américaine de bénéficier d’une chambre d’écho.

Car la théorie d’une conspiration du 11-Septembre, est amplifiée par une guerre médiatique entre la «grande presse», qui la réfute et une multitude de sites Internet indépendants qui pensent que le gouvernement américain est impliqué dans les attentats. En 2005, le documentaire « Loose change», est venu renforcer les doutes des internautes. Ce film, remarquablement réalisé par un jeune amateur affirme que les attentats ont été commandités par l’administration Bush.

Ce documentaire aurait été vu par plus de 100 millions d'internautes.

L'impact de cette guerre de l'information est considérable. Selon une étude menée cet été par l'université du Maryland dans 17 pays, seules 46% des personnes interrogées considèrent qu'Al-Qaida est responsable des attentats du 11-Septembre. 15% accusent le gouvernement américain, 7 % évoquent Israël et 7 % d’autres intervenants. Les médias dominants l'emportent donc, mais de très peu.

Dès lors la question se pose : quelles sont les conséquences politiques de cette théorie du complot ? Antoine Vitkine, journaliste, auteur des Nouveaux Imposteurs (Editions de La Martinière, 2005), répond à l’Express : « elles sont graves car cette théorie mène à confondre l'identité des coupables. En innocentant Al Qaeda, en allant jusqu'à remettre en question son existence, ces imposteurs font le jeu du terrorisme. Or, malheureusement, Al Qaeda existe bien ».

Paul Barelli

Le Petit Niçois