inset histoire

 

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Photographie de Nice en 1861 : le Paillon. Collection privée.
L’incontinence verbale de Garibaldi, son ralliement tardif à la Monarchie, son absence totale de diplomatie irritent les élites gouvernementales turinoises parmi lesquelles il compte de nombreux ennemis. Tenu soigneusement à l’écart de toutes les tractations avec Napoléon III, éloigné de Turin, comblé d’honneurs factices auxquels il est loin d’être insensible, Garibaldi ne découvre que tardivement les velléités françaises sur la Savoie et sur Nice. Bien sûr, la Savoie lui importe peu et, comme la plupart des hommes politiques italiens de l’époque, jugeant qu’elle est terre française, il adhère à l’idée de la cession.

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Gravure satirique représentant Napoléon III enlevant Nice et la Savoie à la mère Italie pendant que Garibaldi corrige l’empereur d’Autriche. Turin, Museo del Risorgimento.
Toute autre est sa position sur Nice, qu’il considère irrémédiablement liée à la Maison de Savoie à laquelle elle s’est librement donnée en 1388. Sa confiance dans le maintien des liens entre Nice et la couronne est confirmée par le fait qu’il y fait transférer les cendres de sa chère Anita en novembre 1859. Quelques semaines à peine avant le rattachement, Garibaldi est encore dans l’ignorance totale des volontés gouvernementales.
De Côme, où il se remettait de ses déboires matrimoniaux avec la marquise Raimondi, il demande à son aide de camp, le colonel Türr, alors à Turin, d’obtenir du roi des éclaircissements sur ses projets pour Nice. Qu’il réponde par oui ou par non ! Le 17 février, Victor-Emanuel répond tristement « oui ». Même s’il comprend qu’il a été manipulé, Garibaldi va peu se préoccuper de sa ville natale et rentre à Caprera.

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Garibaldi au Parlement sarde. Gravure extraite du London Illustrated News, collection privée
Certes, au lendemain du traité du 24 mars 1860,  qui consacre l’annexion, il est élu député de Nice (entre autres circonscriptions) au parlement subalpin, avec trois autres légalistes, Laurenti-Roubaudi, Désiré Niel et Montezemolo. Il est curieux que dans cette période décisive pour l’avenir de sa chère cité, Garibaldi s’en soit tenu si éloigné.  Manipulation de Cavour, incrédulité, confiance excessive dans le Roi ? Mauvais renseignements sur l’état de l’opinion niçoise ?

Lorsqu’il va se réveiller, le 2 avril, il est déjà trop tard. Les dés, pipés d’avance de toutes façons, sont jetés : à l’ouverture de la session parlementaire, on lui interdit de prendre la parole aux motifs que, le président de la Chambre venant de décéder, la législature n’était pas encore constituée. Il lui fallut attendre le 12 avril pour s’opposer publiquement au traité en prononçant son fameux discours, devenu par la suite l’une des références des irrédentistes italiens : « la cession de Nice à Napoléon III est contraire aux droits des peuples ».

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Vision idyllique française du déroulement du plébiscite niçois des 15 et 16 avril 1860. Gravure extraite du Monde Illustré, collection privée.
Même si les arguments, de nature strictement juridique, paraissent convaincants, parvenant même à ébranler Cavour, il était beaucoup, beaucoup trop tard : le plébiscite, prévu pour les 15 et 16 avril, ne pouvait que consacrer le oui. Garibaldi fut bien tenté de se rendre à Nice pour y empêcher la tenue des opérations électorales. Selon Indro Montanelli, il quitta même Turin en compagnie d’un aventurier anglais, Lawrence Oliphant, pour tenter un coup de main contre le plébiscite. Arrivé à Gênes, il change d’avis et rédige le 14 avril sa fameuse lettre au maire de San Remo (ou de Chiavari, ou aux deux ?) qui deviendra le fondement de l’action des fascistes garibaldiens en 1939.

Au lendemain du 16 avril, Nice définitivement perdue, Garibaldi démissionne de son mandat de député. Dix jours plus tard commencera la plus formidable de ses aventures : l’expédition des Mille. Et, pendant quelques années, il n’évoquera plus Nice que pour railler la qualité de ses cigares (fabriqués à la manufacture de la rue Saint-François de Paule), passion rendue célèbre par Rosselini dans son film Viva Italia.

Arrivé au secours de la France défaite par les Prussiens en 1870, élu député (par Nice, entre autres) mais invalidé parce que non Français, Garibaldi ne pouvait pas revendiquer le retour de Nice à la maison de Savoie et ce d’autant moins que la France, devenue républicaine, au moins en apparence, n’était plus censée porter atteinte au droit des peuples alors que l’Italie restait une monarchie. Il s’oriente alors vers un indépendantisme confus qui s’exacerbera à la fin de sa vie.

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Dessin allégorique figurant Nice suppliant Garibaldi de la libérer. Lithographie, collection privée.
 

Moi, je suis Niçois ! C’est-à-dire ni Italien, ni Français. Je ne suis pas Italien puisque le plus grand des grands hommes italiens du XIXe siècle, dont le plus grand titre de gloire est d’avoir échangé deux provinces contre une, a décrété que Nice était française ett que ce décret fut sanctionné, consacré par un vote du parlement sarde avec une majorité de 229 représentants de la Nation. Je ne suis pas Français parce que je reconnais ni la validité ni la légalité du plébiscite organisé par quelques valets de Badinguet, l’empereur mensonge qui a obtenu la majorité à Nice comme il l’obtint en France avec 7 millions de voix obtenues pour lui par les prêtres auprès des populations ignorantes des campagnes.

Je suis donc Niçois et, quand la justice dans le monde ne sera plus une vaine parole, l’indépendance de mon pays sera reconnue et du même coup la vente de Nice par la maison de Savoie, à laquelle Nice s’unit mais ne se vendit pas, sera invalidée.

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Caprera, 4 juillet 1878



 

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