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Nice Le patrimoine gaulliste entre fidélité et ruptureDE GAULLE - La singulière sarabande des héritiers lointains du gaullisme.
Se référer à De Gaulle en se présentant comme son héritier. C’est désormais un rituel obligé que favorise l’approche des échéances électorales. Presque tous les partis s’adonnent goulûment à cet exercice de gaullisme obligé. Même, Jean-Marie le Pen a fait allusion à la figure tutélaire du grand homme. Bientôt, il n’y aura plus qu’Olivier Besancenot à ne pas se référer au fondateur de la Ve République ! À de rares exceptions près on assiste, depuis peu, au bal - non pas tragique, pour reprendre un titre célèbre, mais singulier des héritiers « lointains » du gaullisme. Cette sarabande entraîne dans son sillage les plus hauts personnages de l’État.

Jacques Chirac s’est posé en authentique héritier lorsqu’il a repris le chemin de Colombey pour la pose de la première pierre du mémorial Charles de Gaulle, le jour anniversaire de sa mort, le 9 novembre 1970. Après avoir évoqué l’homme du 18 juin « un héros parmi les plus grands de notre histoire », le chef de l’État a vanté « l’exceptionnelle solidité institutionnelle » engendrée par la Ve République de De Gaulle.

« À ceux qui, aujourd’hui par ignorance ou par calcul, voudraient ébranler cet édifice, je dis : mesurez toute l’irresponsabilité qu’il y aurait à brader ce qu’il y a de plus solide dans nos institutions ». Jacques Chirac a également évoqué la Constitution du 4 octobre 1958 qui nous a permis de surmonter toutes les crises et qui jamais ne fut « un obstacle à la modernisation de la France ».L’allusion à Nicolas Sarkozy était limpide. En novembre 2003, le ministre de l’Intérieur avait lancé sa première attaque contre le chef de l‘État en proposant une réforme qui aurait institué deux mandats présidentiables non renouvelables. Comme l’écrit Midi Libre « voilà donc De gaulle embauché par Chirac pour scier la planche de Sarkozy ». En réponse au pèlerinage des chiraquiens, le président de l’UMP qui n’avait pas été invité à Colombey, a estimé, à Saint-Etienne, que le général De Gaulle « a été l’homme de toutes les ruptures. Il a toujours refusé la continuité, les conformismes, les habitudes, les situations acquises ».

Par hommages interposés, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy se disputent l’héritage du Général. Ce qui irrite certains gaullistes de la première heure, ils qualifient d’ « indécente » cette querelle consistant à s’attribuer un brevet de gaullisme. Le débat n’est pas de savoir si le chef de l’État ou le président de l’UMP sont habilités à se référer au Général. Leur appartenance politique les y incline naturellement. Ils demeurent, cependant, des héritiers « lointains » du fondateur de la Ve. Comme le faisait remarquer, le ministre de l’Intérieur c’est Jacques Chirac lui-même qui avait renoncé à la croix de Lorraine au moment de la création du RPR !

Les Chiraquiens, de leurs côtés, estiment que Nicolas Sarkozy prend des libertés avec l’héritage du général. Son voyage à Washington et sa promotion d’un certain atlantisme auraient fait bondir De Gaulle, soucieux de l’indépendance de la France.

Dès lors, le gaullisme n’est-il plus désormais, comme l’écrit le Progrès qu’ « un cimetière que le président parcourt une fois par an ». Il faut espérer que non. Les différents acteurs de l’instable situation politique actuelle pourraient trouver matière à méditation dans la pensée du Général. La seule doctrine gaullienne fut toujours celle des circonstances. Et non dictée par les partis.

« Aujourd’hui, le gaullisme est davantage une référence que l’expression organisée d’un courant politique, il appartient à notre patrimoine », souligne l’historien et politologue René Rémond dans le Nouvel Observateur qui évoque les générations de gaullistes qui se sont succédé. Les premiers héritiers, Jacques Chaban-Delmas, Georges Pompidou ont disparu. « À mesure que le temps passe, l'image perd un peu de sa force. À l'UMP, on ne parle plus beaucoup de Charles de Gaulle, son portrait qui trônait lors des réunions de parti a disparu. De Pompidou à Sarkozy, on s'est fortement éloigné du général De Gaulle, même si l'admiration sincère reste, comme celle de tous les Français".

À tous ceux, nombreux, qui n’ont pas besoin de se voir attribuer un brevet de gaullisme, nous recommandons la lecture du « Dictionnaire de Gaulle », dans la collection « Bouquins » (Robert Laffont). C’est une véritable mine historique.
Paul Barelli

 

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