inset identite

 

nice-mairie« Siamo tutti Francesi ! » Je ne traduis pas, considérant que la simplicité de cette phrase suffit à sa compréhension, et que ce serait, d’ailleurs, lui faire perdre tout son sel.

C’est un ami, JC, un vieil et bon Niçois, qui me racontait l’anecdote incluant cette phrase mémorable. Elle prend place à Nice au quartier du Passage-à-Niveau, un peu le Piol, un peu la Mantega, dans un bar. Sont attablés nombre d’immigrés italiens. La discussion monte sur des sujets transalpins qui évidemment font polémique. Le ton enfle, les poings se serrent, les injures fleuries se polissent, le tout en italien. Et puis, soudain, un vieux, costaud quand même, frappe du poing sur la table et, dominant le brouhaha, s’exclame, en italien dans le texte, pour bien marquer que tout cela ne concernait plus l’assistance : « Adesso basta ! Siamo tutti Francesi ! ».

Cette apostrophe résume en quelques mots tous les paradoxes niçois. Notre identité est extrêmement complexe, faite de strates et d’apports, acceptés ou rejetés. Au gré des explorations, on y repère la strate gréco-latine, la strate occitane, et par-dessus, une multitude de fragments faits des histoires particulières et familiales, prises dans la tranchante question des nationalités qui exigeait alors que l’on renonce à l’une pour devenir l’autre, voire qu’on la désavoue absolument, dans un impétueux zèle de converti.

Ainsi, un Niçois de la couosta plena devient furieux quand on le traite d’Italien. Du point de vue historique, il a raison. Du point de vue culturel, c’est bien plus compliqué. Du point de vue humain, cela donne des moments cocasses, comme celui-ci. En voici un autre.

Enfant, ma famille profitait de la maison d’un grand-oncle à Limone, aux vacances d’été comme pour faire du ski (le père du grand-oncle en question avait quitté Limone enfant, pour s’établir boulanger, rue du Pont-Vieux, et se glorifiait d’y avoir été le premier fabricant de gressins de tout Nice, c'est-à-dire du Vieux-Nice). Jusqu’à mon adolescence, j’y allai avec mes parents, en voiture, peu importe la marque mais ceux qui comme moi, ont joui des méfaits de sa suspension hydraulique sur la digestion l’auront reconnue. Et puis vint le temps où, pour marquer mon indépendance et ma maturité, je revendiquai le droit de les rejoindre plus tard et d’en partir plus tôt, seul, donc de monter en car. On n’avait pas encore, alors, rétabli la liaison ferroviaire Nice-Coni. Il y avait six postes-frontières à franchir : le français de Vintimille ; l’italien de Vintimille ; l’italien de Fanghetto ; le français de Piene ; le français de Tende, dédoublé en douanes à la sortie du village et en police à l’entrée du tunnel ; l’italien de Limonetto, à la sortie du tunnel. Alors, pour plus de commodité, le contrôleur du car –le service était assuré depuis Nice par une compagnie italienne- collectait au départ les cartes d’identité de tous les voyageurs, les présentait en vrac à chaque poste et, une fois le dernier franchi, les restituait à leurs détenteurs en faisant l’appel.

C’était les cartes d’identité de l’époque, ces cartons jaunâtres pliés en deux, avec à l’intérieur une triste photo en gris et blanc, une baveuse empreinte d’index droit violette, une signature au Bic noir et, pour seul éclat de vraie couleur, les timbres fiscaux de la première page, souvent bleu ou vert, avec parfois un bordeaux. Le contrôleur les dépliait et appelait le nom : « Viale. Dalmasso. Bottero. Macagno. Riberi. Giordanengo. Donadei. Barelli. Bosio. Musso. Oddo. », et tant d’autres que vous pourrez ajouter vous-mêmes, autant de noms portés sur les rectangles jaunes, estampillés « République française. Carte nationale d’identité ».

« Siamo tutti Francesi ! ».

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