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NICE, INTERNET, HADOPI, MMM et tutti quantiHADOPI INTERNET - Alors que les députés socialistes devaient déposer hier après-midi devant le Conseil constitutionnel le recours qu'ils avaient annoncé contre la loi Hadopi sanctionnant le téléchargement illégal, les regards croisés sur cette loi controversée de Muriel Marland-Militello députée de Nice et des Alpes Maritimes, rapporteur pour avis de la commission de la culture lors des débats parlementaires, et d’Alexandre Kroutinsky, expert en systèmes d’information et de communication, démontrent qu’ils ne sont d’accord que sur un paramètre : la nécessité d’agir.

Hadopi, antivol numérique ou flicage aléatoire ?

Hadopi, un bien charmant diminutif pour une administrative «Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits sur Internet» qui fleure bon la sanction… Le principe en est limpide : un internaute surpris en flagrant délit de téléchargement illégal (MP3 ou DIVX) par un logiciel mouchard « hadopien » recevra dans un premier temps un mail à vocation pédagogique, lui expliquant les méfaits d’un tel acte de vol à l’étalage numérique. Piqûre de rappel lors du second téléchargement illégal, survenant dans les six mois suivants, avec cette fois l’envoi d’un courrier recommandé avec accusé de réception. Toujours pédagogique, mais… moins. L’ultime étape ? La coupure claire et « net » de sa connexion personnelle ou professionnelle, pour une durée comprise entre deux mois et un an suivant le niveau de récidive, et avec maintien du paiement de l’abonnement. 

« Les lois ne sont que les conséquences d’un problème », souligne Muriel Marland Militello, député et adjointe au maire de Nice en charge de la culture. Et problème il y a : selon une récente enquête, 53% des internautes français âgés de plus de 16 ans auraient déjà téléchargé au moins une fois un film ou une musique MP3 en toute illégalité, et bien souvent en toute connaissance de cause, sur des sites dédiés. Un vrai phénomène de société, en constante progression. Et pourtant, Hadopi divise. Trop laxiste, liberticide ou techniquement inefficace, même les artistes, premiers ciblés en termes de piratage d’œuvres, donc de pillage de propriété intellectuelle, n’arrivent pas à s’entendre sur les méfaits du téléchargement sauvage. Un groupe de rock niçois vient même de créer un Facebook intitulé « soutien aux musiciens opposés à Hadopi ». 

Hadopi, ce n’est pas que de la pure sanction : c’est aussi la labellisation de sites de contenu téléchargeable, un développement des offres « légales ». C’est en tout cas la partie que défend Muriel Marland Militello, qui souffre devant la dématérialisation du monde culturel. « Ce sont les jeunes qui téléchargent le plus. Nous nous y sommes pris un peu tard pour faire de l’éducation… Et la technique évolue trop vite, avec des juristes qui ont du mal à suivre ». D’où cet amendement, signé MMM, sur le principe d’une veille technologique, « pour changer de méthode au rythme des évolutions. C’est pour cela aussi qu’il faut une loi assez souple. » 

Là est effectivement l’épine pour Alexandre Kroutinsky : « Pour sanctionner un internaute, Hadopi passe par l’adresse IP du poste informatique utilisé, puis contacte le fournisseur pour obtenir les coordonnées de l’internaute en cause. Hadopi va être difficile dans sa mise en application, car il considère l’adresse IP comme une preuve d’identité, alors qu’il est aisé d’usurper cette adresse. Autre écueil : dans une entreprise, une école, une collectivité, sans parler d’un cybercafé, l’adresse IP qui apparaît sur la toile est celle de la structure, et non celle d’un poste en particulier… Un peu comme un central téléphonique. Et le wifi ? Il est facile de se connecter sur le réseau du voisin, même protégé, et de surfer via son adresse IP. Et qui recevra le courrier ? » Pour Muriel Marland, il suffira alors « d’avertir Hadopi, ou de se prémunir d’un logiciel de sécurisation. » Pas gagné, pour Alexandre Kroutinsky, qui évoque déjà d’autres systèmes pour arriver à télécharger sans se faire télé-déconnecter : « le P2P classique (échange de fichiers d’internaute à internaute) va laisser place à de nouveaux réseaux entièrement cryptés pour éviter d’être vus. Ils existent déjà, mais sont encore très peu fréquentés. La loi pourrait aussi encourager le développement de Usenet en SSL (un autre système de cryptage des données), l’usage d’offres en réseaux privés (VPN) ou d’anonymat payant. D’autres téléchargements directs (rapidshare, megaupload…) ou le passage par le streaming (diffusion d’image ou de son en temps réel) premettraient vraisemblablement de passer entre les mailles d’Hadopi. » 

Conclusion : « La loi ne sanctionnera que les petits contrevenants qui n’ont pas de compétences techniques pour échapper aux contrôles. Et donnera ainsi l’illusion d’une efficacité contre le piratage en diminuant la partie visible de ce piratage. » Et c’est peut-être là que politiques et experts ne se comprennent pas. Pour MMM, c’est bien l’enjeu visé : « On ne cherche pas à retrouver les 10% de « pro » du téléchargement illégal, et l’important reste de sensibiliser les internautes aux conséquences de cet acte sur la création artistique française, une exception culturelle qu’il nous faut préserver. Sinon, nous n’aurons plus que de l’animation et du hamburger à télécharger… Le but n’est pas d’empêcher les jeunes d’accéder à la culture avec une sanction pénale inadaptée, comme le stipulait la loi précédente, mais bien de les remettre sur le droit chemin en les sensibilisant sur le problème des droits d’auteurs sur internet. » 

Si la démarche est louable, quid de la présomption d’innocence de « faux pirates » épinglés par une Hadopi vigilante, certes, mais flouée par les techniques en perpétuelle évolution et les méandres inextricables de la toile ? « Il faudrait surtout que la culture audiovisuelle soit moins coûteuse pour les consommateurs. Pourquoi pas une baisse de TVA, comme pour le livre, qui pourrait renforcer les ventes ? » propose Alexandre Kroutinsky. Notre député, elle, s’insurge déjà contre toute proposition de licence globale et autres contribution à la créativité : « C’est impossible, lorsqu’on fait payer un forfait, de payer les artistes au prorata des téléchargements. C’est tout à fait ingérable. Et un abonnement monterait jusqu’à 80€ par mois. » A ce prix-là, il faudra cliquer utile toute la sainte journée pour rentabiliser, n’en déplaise aux patrons ou aux profs. 

Chère culture, légale ou pas… 


 

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